Co-écrit avec Alexandre Menuel.
Comprendre la culture d’entreprise
La culture d’entreprise désigne l’ensemble des comportements, habitudes et mode de travail qui fondent l’identité organisationnelle d’une entreprise. Quand la raison d’être et les valeurs sont authentiques et incarnées dans le réel, la culture découle de l’alchimie entre ces éléments. Par exemple, la culture d’entreprise, c’est la différence entre Greenpeace et Sea Sheperd, deux organisations humaines qui luttent pour protéger l’environnement et préserver la biodiversité. La première possède une culture de la non-violence et du lobbying quand la seconde tend à l’action combative voire le conflit. Bien qu’alignées sur les mêmes finalités, ces deux cultures développent des propos, des relations aux partenaires et des méthodes diamétralement opposés. Cette différence s’exprimait parfaitement bien dans les propos violents de Sam Watson, le patron de Sea Sheperd à l’époque, qui dans la guerre menée contre les baleiniers japonais, accusait Greenpeace d’être « une organisation bureaucratique qui fait du mailing » ! Par extension, on peut raisonnablement supposer que les collaborateurs de ces deux organisations n’ont pas les mêmes valeurs …
Dépasser les cultures d’entreprise de façade
Pendant longtemps, la culture des entreprises fut la chasse gardée de stratèges et de communicants, construite sur un corpus de valeurs, dont la finalité première était d’être affiché dans les différents documents de la communication institutionnelle. Innovation, respect, excellence, agilité, solidarité, intégrité, satisfaction client, esprit d’équipe … Si l’on étudie d’ailleurs les 40 derniers rapports annuels du CAC 40, on s’aperçoit que non seulement les valeurs varient avec l’époque, et les mots à la mode (bienveillance, innovation…), mais que les entreprises utilisent quasiment toutes, le même corpus de valeurs, avec dans le trio de tête des plus utilisées : innovation (9 fois), respect (9 fois) et excellence (6 fois).
Ces entreprises ont-elles vraiment des cultures identiques, ou utilisent-elles ces mots comme autant de slogans dénués de réalité tangible ?
S’il est plutôt efficace à l’égard des clients et du marché, cet affichage de valeurs a très peu de chances d’être créateur de valeur en interne. Il n’était pas rare qu’au gré des changements de marché, de business et de directeur de la stratégie, les entreprises adaptent leur raison d’être pour coller à l’air du temps. Nous estimons au contraire que la raison d’être doit être stable par essence, et faire à la fois office de boussole et de moteur pour l’entreprise et ses salariés. Il est préférable que celle-ci et la mission de l’entreprise (sa réponse à la raison d’être) soient co-construites, diffusées, partagées et vécues comme une différence, une source de motivation pour chacun et d’énergie pour la dynamique collective. La diffusion et la transmission de la raison d’être vers les clients et le public doit se faire davantage via le canal des collaborateurs (qui s’en sont emparés) que celui de la communication institutionnelle « classique ». Si l’on en croit un sondage récent (Ifop pour No Com, Tikehau Capital et l’Essec), le vrai problème des valeurs comme de la raison d’être en entreprise est leur défaut de mise en œuvre : 75% des salariés français pensent que la raison d’être est un sujet important dans l’entreprise, pourtant 69% pensent que ce n’est malheureusement qu’une opération de communication et, pire, 31% d’entre eux ne croient pas à la sincérité de la démarche. En somme, si culture d’entreprise il y a nécessairement, elle n’est probablement pas vraiment en ligne avec ces valeurs d’affichage et ses raisons d’être bien marketées ou désincarnées.
Accepter le grand retour du sens
Dans notre monde occidental, la recherche de sens, tant individuelle (yoga, religion, action humanitaire, développement durable…) que collective (fondations, mécénat, joint-ventures sociale…) s’est imposée comme une tendance lourde. Si bien que les entreprises n’ont d’autre choix que de se reposer la question du sens, de la vision et de leur impact. Cette question devient progressivement essentielle pour garantir à la fois l’engagement et la performance de leurs collaborateurs et de leurs futurs collaborateurs (dans un contexte de guerre des talents) mais aussi pour préserver ou gagner la confiance de leurs clients et partenaires. Pour s’en convaincre, il suffit de considérer une étude de l’EDHEC de 2017 qui voyait l’économie sociale et solidaire faire son entrée fracassante dans le top 3 des secteurs préférés des jeunes étudiants en prépa – et même se hisser à la première place chez les femmes, loin devant la communication ou le luxe. Si l’on ajoute à cela l’étonnant développement des pratiques de développement personnel, le poids médiatique de la transition écologique et de notre responsabilité vis-à-vis des générations futures, la question du sens et de la raison d‘être est devenu un enjeu central que l’entreprise doit se réapproprier.
Produire du sens pour améliorer la performance
Dès lors, que faire pour retrouver une culture d’entreprise réelle, incarnée, motrice et partagée ? Il y a au moins deux manières d’entreprendre un tel chantier, en gardant à l’esprit que ces questions de valeurs et de raisons d’être ne sont certainement pas des projets de transformation de court terme.
La première consiste à partir des pratiques et des postures managériales observables pour les amener à changer progressivement. Chez Tenzing nous accompagnons nos clients en les aidant à incorporer peu à peu de nouveaux comportements et de nouvelles postures managériales co-construites et partagées qui répondent à des problèmes identifiés. Nous sommes heureux de confirmer que cela satisfait de plus en plus de collaborateurs et rend la vie de bureau plus performante, plus agréable et mieux organisée. Chemin faisant, ce processus amène tout naturellement le collectif à questionner ses propres valeurs, à questionner la raison d’être. C’est donc par le réel qu’une prise de conscience culturelle (au sens de la culture d’entreprise) commence, pour aboutir en bout de cycle à une refonte des valeurs et de la raison d’être déjà largement entamée par la pratique.
Nous pensons également qu’il est possible – et parfois même souhaitable – de procéder à l’inverse. L’idée est de co-construire en interne un nouveau corpus de valeurs, et une raison d’être plus en lien avec les aspirations du monde et des salariés sans oublier la mission de l’entreprise. C’est un processus relativement long, de débat, de partage et d’alignement pour aboutir à un socle solide. Ces fondations seront le point de départ de déclinaisons opérationnelles dans les pratiques, les méthodes et les comportements en entreprise, pas à pas.
Mais quand la véritable raison d’être d’une entreprise n’est qu’économique, on ne peut plus s’attendre à motiver au long cours les salariés. Michel Leclerc, le fondateur de Décathlon, explique très justement que la santé financière, comme la santé, ne peut pas être une ambition. « On préserve sa santé pour faire des choses de sa vie ». La culture d’entreprise et sa dimension managériale gagneront en force à partir du moment où l’entreprise servira une raison d’être engageante avec des valeurs véritablement inspirantes pour guider le travail au quotidien. La raison d’être est une chance, car elle possède un pouvoir important de transformation pour les organisations.
Chez Tenzing, nous avons fait de la promotion de l’égalité des chances notre raison d’être. Chacune de nos valeurs fait l’objet d’une réflexion constante pour remettre en question et améliorer nos actions, nos comportements et nos pratiques managériales. C’est bel et bien notre culture qui évolue sans cesse pour mieux servir notre raison d’être.