En créant de la valeur et du sens pour ses clients et ses collaborateurs, et même son écosystème de manière plus large, l’engagement sociétal profite également à l’assureur. Loin d’être une non-question pour les assureurs, la loi Pacte, en remettant l’engagement sociétal au cœur de leur stratégie, peut insuffler une transformation durable de l’entreprise car créatrice de valeur sur le long terme.
Les assureurs, par nature engagés ?
Depuis l’entrée en vigueur de la loi Pacte en mai 2019, beaucoup d’acteurs se sont lancés dans la reformulation/réaffirmation de leur raison d’être au-delà d’une vision purement économique : souvent avec une campagne de communication interne et externe, et pour certains, un travail de co-construction impliquant les collaborateurs. Certains ont intégré leur raison d’être dans leurs statuts quand d’autres ont utilisé la raison d’être comme une ligne stratégique et/ou une ligne de communication. Rares sont les entreprises volontaires pour le 3ème étage de la fusée, c’est-à-dire, l’adoption de la qualité d’entreprise à mission (comme le Groupe Rocher ou la MAIF par exemple).
Pour bon nombre d’assureurs, la loi Pacte est d’abord apparue comme une non-question. En effet, le cœur de métier des assureurs est de protéger et d’accompagner les acteurs de la société (particuliers, associations, entreprises, etc) dans la gestion de leurs risques, et donc porte en soi un engagement sociétal. Cela est d’autant plus vrai pour les mutuelles qui font partie des acteurs de l’économie sociale (donc à but non lucratif). Par ailleurs, les assureurs, quel que soit leur statut, mènent déjà un grand nombre d’initiatives sociétales :
- Employeur social et responsable : chez Groupama, les offres de postes, stages et contrats en alternance à pourvoir au sein de Groupama Asset Management sont toujours transmises de manière systématique à des organismes spécialisés dans le recrutement et la formation de personnes en situation de handicap.
- Consommateur et investisseur responsable : Generali souhaite augmenter la part des primes liées au secteur des énergies renouvelables et développer sa gamme de produits à valeur ou à orientation environnementale.
- Producteur innovant inclusif et responsable : la MAIF où les contrats d’assurance habitation prennent en compte, sans cotisation supplémentaire, les nouvelles technologies d’économies d’énergie. Contrairement à de nombreux assureurs, la MAIF accepte de garantir : les chauffe-eaux solaires, les éoliennes, les installations photovoltaïques individuelles.
- Porteur d’innovations sociales et managériales : Generali, implanté en Seine-Saint-Denis, s’engage en faveur de l’égalité des chances en diversifiant ses sources de recrutement et en s’ouvrant à de nouveaux profils issus d’horizons et de parcours variés
Aller plus loin dans l'engagement sociétal jusqu'à la transformation
Pourtant les assureurs peuvent aller plus loin dans leur engagement sociétal : dans sa dimension impactante (augmenter son impact sur la société), mais surtout dans sa dimension transformante, car la transformation invite davantage à requestionner son modèle opérationnel et économique.
Au-delà des nombreuses initiatives sociétales en place, les assureurs peuvent accentuer leur impact en :
- travaillant sur la profondeur de leur impact (des produits toujours plus inclusifs, solidaires, et soucieux de l’environnement par exemple)
- élargissant le public touché : aller au-delà de l’impact sur ses parties prenantes principales (ses clients et ses collaborateurs) et ainsi augmenter l’essaimage de son engagement sociétal (ses fournisseurs et l’ensemble de ses partenaires)
Mais plus que la dimension impactante de l’engagement sociétal, c’est la dimension transformante de l’engagement sociétal qui retient toute notre attention car elle est révélatrice de la dynamique et de l’ambition de l’entreprise qui s’engage. L’engagement sociétal est plus transformant dès lors que ses actions touchent davantage le cœur de métier de l’entreprise. C’est par exemple, comme à la Macif, permettre à ses assurés les plus fidèles en situation de chômage et de perte significative de revenus, de prendre en charge jusqu’à 99% de leurs cotisations sans diminution de la couverture d’assurance Prévoyance. Ces assurés avec des revenus en baisse pourraient être vus comme de mauvais payeurs en puissance et deviennent en plus des profils plus à risques en matière de Prévoyance. Cette lecture de la situation ne vise pas à rechercher plus de profits, mais simplement à gérer sainement son portefeuille de risques, et ce, de manière légitime puisque c’est la mission première d’un assureur. Cependant, avec ce dispositif, la Macif fait le choix de la confiance et de la solidarité : faire confiance à ses sociétaires les plus fidèles, et être solidaire en prenant en charge les cotisations de ces personnes qui ont davantage besoin d’être protégées car en situation de fragilité. Même si à court terme ce choix peut avoir un coût, à long terme, il peut générer davantage de valeur et de sens :
- fidéliser davantage ses assurés car on les a aidés à un moment où ils en avaient réellement besoin : le fameux « moment de vérité » d’une expérience client réussie
- aider l’assuré à rebondir et donc à redevenir un bon payeur et un meilleur profil de risque
- avec cette expérience client positive, créer des ambassadeurs de la marque pour recommander l’assureur qui acquiert donc une image très forte de confiance et de protection
- donner du sens aux collaborateurs de la Macif en leur permettant de faire correctement leur travail, c’est-à-dire protéger les assurés, avec en plus un sentiment de fierté,
Repenser son offre avec l’œil neuf d’un acteur pleinement conscient de son impact sur la société peut faire évoluer le modèle opérationnel de l’entreprise, mais également son modèle économique. Accepter une nouvelle manière de générer de la valeur est clairement plus transformant que de mettre en place des initiatives de mécénat social, bien que tout autant honorable évidemment. Viser le cœur de métier pour renforcer son engagement sociétal amène l’assureur à s’interroger sur sa lecture de la valeur dans le temps (court terme/long terme) et donc sa manière de prendre des décisions. Cela passera également par des choix et des arbitrages forts sur le partage de la valeur avec l’ensemble de ses parties prenantes.
L'engagement sociétal, une stratégie vertueuse
L’engagement sociétal, encore plus dans un monde qui se questionne après la crise sanitaire du Covid, devient un levier business très puissant en répondant à la fois aux attentes des assurés et de leurs collaborateurs.
- Les assurés souhaitent des produits et des services plus responsables. Ainsi avec l’engagement sociétal, les assureurs peuvent non seulement séduire de nouveaux clients mais aussi les fidéliser grâce à la singularité et à la confiance que procure l’engagement sociétal de l’assureur
- Les collaborateurs aspirent à plus de sens dans leur travail. Ainsi les assureurs peuvent attirer de nouveaux talents et les fidéliser grâce au sens apporté par l’engagement social et sociétal, moteur également d’une bonne performance dans une logique de symétrie des attentions.
En créant de la valeur et du sens pour ses clients et ses collaborateurs, et même son écosystème de manière plus large, l’engagement sociétal profite donc également à l’assureur : une stratégie triplement gagnante. In fine, cette recherche de valeur et de sens renforcera la singularité de l’assureur et lui permettra de mieux se différencier dans un paysage concurrentiel marqué par des acteurs tels que les GAFAM, BATX, et Insurtechs. L’engagement sociétal devient plus que jamais une stratégie vertueuse.